Serge Le Dizet du tac au tac

mardi 18 octobre 2005
Football : « Le sentiment que l'équipe n'est pas au maxi »
FC Nantes: Serge Le Dizet du tac au tac




Serge Le Dizet refuse le débat sur son autorité auprès de joueurs qui n'ont pas encore donné le maxi pour reprendre les termes du coach nantais. Un entraîneur pour qui Jérémy Toulalan n'a pas d'interdits dans son jeu.

Entraîneur d'une équipe qui en garde souvent sous le pied, ce qui l'irrite, Serge Le Dizet défend ses choix et son autorité. Et le Breton persiste et signe : fondamentalement, il croît en cette équipe.

Serge Le Dizet, on vous sent parfois éprouvé, résigné, du moins fatigué ?

Depuis ma prise de fonction, cela a tout de même été costaud ! Le challenge du maintien a été éprouvant. Nous sommes repartis avec beaucoup d'espoirs, mais en ayant toujours conscience des difficultés qui pouvaient se présenter. Je suis réaliste. Je garde confiance car je sais ce dont cette équipe est capable quand la volonté de vaincre et l'engagement sont au rendez-vous. Je n'ai pas le sentiment qu'elle soit au maxi. Pour autant, face à Saint-Etienne, je pense que les garçons ont répondu à mon attente au niveau de l'engagement. Mais pour revenir à votre question, parler d'usure au bout d'un an serait dramatique. Sur deux ou trois matches, oui, j'ai éprouvé un mélange de colère et de frustration.

On a du mal à partager votre point de vue sur le match de samedi. Des spectateurs ont même été outrés par l'attitude d'Emerse Faé, qui a passé une majeure partie du temps à marcher ?

Posez lui la question.

C'est votre sentiment que nous aimerions connaître.

Moi quand j'ai des choses à dire, je m'exprime directement auprès des intéressés. Arrêtez de vous inquiéter. Certains entraîneurs ont peut-être besoin de crier sur les toits, personnellement, j'ai suffisamment montré mon autorité.

On s'interroge malgré tout sur votre indulgence lors de ces exercices effectués parfois sans conviction. Où est l'entraîneur qui se réclame de Jean-Claude Suaudeau ?

Là aussi tout évolue. À l'époque, vous - les médias - n'étiez pas présent du lundi au vendredi à l'entraînement. Votre regard a évolué. La société veut que l'on éprouve également le besoin d'être plus critique, que l'on cherche la petite bête. Et puis, moi aussi il m'arrive de gueuler.

On a tout de même le sentiment que vous êtes respecté mais pas craint par vos joueurs ?

Mais le contexte se veut différent. À mon époque, un Vahid (Halilhodzic) aurait été respecté pendant cinq ans par ses joueurs. Là, on a vu qu'au bout d'une saison, il ne le craignait plus. Il ne faut pas voir les choses de cette manière. Aujourd'hui, un joueur peut te claquer la porte d'une façon ou d'une autre, quand il le désire... Et puis, vous citez Coco. Mais auprès de qui poussaient-ils ces gueulantes ?

Des plus jeunes...

Merci d'avoir répondu. Je parlais avec le président Roussillon de ces coaches à forte personnalité, notamment de Guy Roux qu'il a côtoyé à Auxerre. Je lui disais que j'avais notamment vu Guivarc'h le traiter de tous les noms...

Quand Toulalan donne deux ballons de but avec les Espoirs face à la Suisse, cela nous vous interpelle pas ?

Mais Jérémy n'a pas d'interdits ! Moi ce qui m'importe, c'est l'équipe, son équilibre entre les phases offensives et défensives. Si Jérémy se montre plus offensif avec l'équipe de France espoirs, c'est peut-être que ses coéquipiers lui permettent d'aller plus haut.

Mais ne seriez-vous pas tenté de lui accorder davantage de liberté offensive, sachant que c'est l'un des seuls capable d'éliminer ?

Si je le place plus haut, j'ai qui pour évoluer à sa place ? Le petit Ca.

Ou Emerse Fae ?

Emerse a montré des choses sur le plan offensif. Je me répète, cela ne me gène pas que Jérémy aille porter le danger plus haut. Je le lui ai encore répété avant le match : sur trois, quatre coups, n'hésite pas à percuter. Il n'y a pas d'interdits, mais pas de Mavuba (son coéquipier chez les espoirs) chez nous. Et puis, si vous avez bonne mémoire, vous vous apercevrez que j'avais positionné Jérémy plus haut face à Metz...

Et quand Da Rocha - dont l'influence semble moindre - se place d'autorité derrière Signorino, cela vous inspire quoi ?

Da Rocha, c'est l'image de la générosité, de l'implication. Je n'ai même pas eu besoin de lui demander, alors que Franck était malade. Il a pris les devants, fait preuve d'initiative. Cela m'a beaucoup plu ! Cela va dans le sens de ce que je leur demande. Il s'agit d'un retour à la normale. On a besoin de tels gestes, de petits plus, de revenir à quelque chose de plus cohérent, à plus de logique. Cette image, on doit la valoriser.

Dans ces moments difficiles, vous ne vous sentez pas un peu seul ?

D'abord, c'est le métier du coach qui veut ça. Ensuite, j'ai des gens autour de moi. Après, le club est organisé d'une certaine façon, moi j'essaie d'être le plus performant possible dans la gestion de mon équipe.

Alors que le président a évoqué un objectif comptable pour les trois prochains matches, vous sentez vous menacé ?

Il n'y a rien d'illogique dans sa démarche. Après, on avait parlé de Vahid avant le début du championnat, puis j'ai lu dans la presse (L'Equipe Magazine) que j'étais l'entraîneur risquant de sauter le premier. Ça interpelle. On sait tous qu'à un moment ou un autre...
Recueilli par Christophe DELACROIX.